Depuis sa création, le Réseau National des Juniors Associations (RNJA) a coordonné plusieurs études sur les pratiques et fonctionnement des Juniors Associations (JA). Jusqu'à présent, aucune d'entre elles ne s'était concentrée sur un « secteur » de pratique en particulier. L'étude présentée ici apporte donc de nouvelles perspectives au RNJA. Pourquoi avoir choisi de se focaliser sur l'expression artistique et les pratiques culturelles ?
D'une part, parce que 40% des JA expriment qu'une partie de leurs actions s'inscrit dans le champ artistique et/ou culturel, ce qui mérite une attention particulière.
D'autre part, parce que la dimension culturelle telle que nous l'avons étudiée est transversale, plurielle mais aussi au fondement même des relations collectives. Il paraissait donc pertinent d'interroger les membres des JA se déclarant agir dans ce domaine, sur leur façon de voir, d'aborder et d'agir par et pour la culture. 

Voici quelques axes de réflexion mis en évidence par l'étude.

Pratiques artistiques et culturelles : éléments de construction de l'identité des jeunes

Les pratiques artistiques et culturelles développées par les adolescent·e·s ont une place importante dans la construction de leur identité. Les jeunes  apprennent, échangent, entrent en contradiction, s'enrichissent : c'est le début d'un apprentissage non formel, “un rituel de passage entre l'enfance et l'adolescence”. (Sudres, 1998 / Barbot et Lubard, 2012)

Les jeunes peuvent avoir accès à des pratiques artistiques et culturelles sous bien des formats, que ce soit individuellement ou collectivement, depuis chez eux·elles, via l'offre des structures culturelles et artistiques de leur territoire ou de leur établissement scolaire ou encore via le numérique. Qu'est-ce-qui pousse un groupe de jeunes à structurer une pratique artistique et/ou culturelle en Junior Association ? C'est de cette question que le RNJA et ses partenaires sont partis pour débuter cette étude.

 

Juniors Associations : lieu de l'apprentissage du collectif

Parmi les axes de recherche de l'étude, le rapport entretenu par les JA avec la notion de collectif liée à celle de l'apprentissage entre pairs est apparu comme particulièrement marquant : le collectif est central chez les Juniors Associations interrogées. Elles ont régulièrement mis en avant cette notion  d'espace d'auto-formation, de développement de compétences où l'erreur est autorisée. Plusieurs d'entre elles mentionnent le besoin de formaliser leur projet en statut associatif : la JA leur permet de valoriser leur capacité à faire et entreprendre, que cela soit par et pour soi-même (confiance en soi), pour être vu·e·s des adultes (reconnaissance) ou encore des autres jeunes (montrer un exemple).

 « Oui, c'est le labo d'expérimentation parce que… parce que t'es jeune, parce que tu peux te permettre de faire des conneries, parce qu'on t'en voudra pas. Et on, on t'en tiendra pas rigueur. Et des fois tu peux faire des grosses bêtises et c'est pas grave. » (N., Théâtre 1)
Expérimenter et revendiquer

Junior Association apparaît particulièrement comme un laboratoire d'expérimentation mais aussi comme un lieu de revendication d'une liberté totale de création. 
Cette définition se retrouve notamment dans leur rapport à l'accompagnement. Les Juniors Associations ont le choix d'être accompagnées localement ou non : chez les JA culturelles et artistiques, le choix de ne pas avoir d'Accompagnateur·rice Local·e est plus important que chez les autres JA. En 2019, sur l'ensemble des JA habilitées par le RNJA, environ 16 % n'avaient pas d'AL. Pour celles qui développent des activités culturelles, elles sont 25,5%. Pour certain·e·s jeunes interrogé·e·s, l'accompagnement va même à l'encontre de la dimension émancipatrice et de la liberté de création permise par la démarche Junior Association.

Cette notion se retrouve également dans l'appétence des Juniors Associations ayant des pratiques artistiques à produire des créations originales : 78% de ces dernières déclarent baser leurs pratiques notamment sur la création originale. Écrire ses scénarios, créer des chorégraphies, composer sa musique ou encore créer son spectacle de A à Z sont autant d'éléments fondamentaux d'expression pour ces Juniors Associations

L'analyse des différents matériaux engage à s'interroger sur ce que signifie cette revendication d'une liberté totale de création des jeunes, qui semblerait ne pas être « autorisée » dans les espaces culturels et scolaires existants. 

Quel accompagnement pour les jeunes dans leurs pratiques ?

Cette étude questionne également l'environnement dans lequel les JA évoluent. Plus exactement, le rapport qu'elles ont avec les ressources et l'accompagnement local de celles-ci, que cela soit par les associations d'éducation populaire et du secteur culturel et artistique ou l'intervention publique en soutien aux projets d'initiative jeunes et le système scolaire.

En écho à l'étude des 20 ans du RNJA sur l'impact de l'engagement en JA sur le parcours des jeunes, les différents résultats de cette étude mettent en évidence un lien complexe entre le système scolaire et le rapport à la culture, les attentes des jeunes. Les jeunes interrogé·e·s affirment à 69% bénéficier d'activités artistiques et culturelles au sein de leur établissement scolaire. Cependant, seul·e·s 29% considèrent que cela leur permet de développer les activités de leur Junior Association. 

« Quand on est au collège ou au lycée, en français surtout, quand on fait des voyages, quand on étudie les tableaux en arts plastiques, tout ça, bien sûr qu'on a une approche de l'art et la culture ! Mais c'est une approche de la culture qui est basique et… c'est-à-dire que c'est toujours la même chose ! » (R., Magie)
À la recherche de reconnaissance et de valorisation

Un autre axe de l'étude vient interroger le besoin de reconnaissance et de valorisation qui semble central chez les Juniors Associations ayant des pratiques artistiques et culturelles. Cette recherche est présente en amont de leur création, qui apparaît comme une raison de leur structuration en JA, mais aussi au moment de la réalisation de leurs projets. Ce constat est encore plus visible pour les JA implantées dans les Quartiers prioritaires de la Politique de la Ville.

 

Cette expression d'une nécessité de lutter pour être reconnu·e·s dans leur pratique autonome puis accompagné·e·s dans sa mise en lumière questionne notamment la place donnée aux jeunes dans le système culturel global. 

L'ensemble de ces recherches sont à découvrir plus en détails dans la synthèse et le rapport final de cette étude.

 

Composition des comités :
Comité Scientifique :
Chantal DAHAN - Institut National de la Jeunesse et de l'Éducation Populaire (INJEP) et Lisa MARX ­ Chercheuse post doctorante et chargée de veille.
Comité de Pilotage : Élisabeth DAUMAS / Laurence MARTIN / Paul GERNIGON - Ministère de la Culture, Chantal DAHAN - INJEP, Catherine REVERDY - chargée d'étude et de recherche, Lucile DEBAYE - Confédération des Maisons des Jeunes et de la Culture de France (CMJCF), Priscilla MARTIN - Association Opale, Marine BOIN - RNJA.
Analyse complète et rédaction du rapport final : Maryam MAHAMAT et Fransez POISSON - Coop'Eskemm 
Récolte de données : Marine BOIN et Maria KADZHAEVA - RNJA.
Comité de rédaction pour la synthèse : Sarah HOLVECK, Lucile DEBAYE - CMJCF et Marine BOIN - RNJA.

 

Cette étude a été réalisée avec le soutien du Ministère de la Culture, du Ministère de l'Éducation Nationale, de la Jeunesse et des Sports - Direction de la Jeunesse, de l'Éducation Populaire et de la Vie Associative et de l'Agence Nationale de la Cohésion des Territoires.